Entorse de la cheville : la comprendre et la traiter

23/03/2019

Un peu d'anatomie

La cheville représente l'articulation qui relie le pied et la jambe par l'intermédiaire d'une liaison entre le tibia et le péroné. Ces derniers vont glisser sur le talus et la calcanéus, permettant d'assurer le mouvement de flexion-extension du pied ainsi que les autres mouvements d'amplitude plus réduite. C'est l'association de tous ces mouvements et leur combinaison qui permettent des mouvements plus complexes.

Pour être stable, la cheville est maintenue pas des ligaments et des muscles qui viennent de la jambe mais aussi de l'interne du pied. Ce système très sophistiqué permet les mouvements complexes de la chevilles mais il est mis en tension dès que le sol n'est pas stable, ou que les forces exercés dessus lors de saut sont trop importantes. Dans la plupart des cas, les mécanismes adaptatifs spécifiques du pied permettent d'amortir les chocs mais il arrive que dans certaines conditions le pied se dérobe, ce qui abouti à une entorse.

Il existe des entorses internes et externes du pied, la cheville étant maintenue uniformément. Malgré cela, le plus souvent, on parle d'entorses externes. Ceci se comprend en analysant le déroulé classique du pied : au sol l'impact se fera par la partie postéro-externe du pied.

Comment un ligament supporte-t-il une trop grande tension ?

Il faut savoir que les tendons ont des propriétés élastiques mais que les ligaments ne sont pas extensibles. Ils possèdent des capteurs sensitifs qui, lorsqu'ils sont soumis à une forte tension dépassant leur capacité d'adaptation, donne l'information par réflexe aux muscles de se contracter pour protéger l'articulation. Si la tension est toujours trop importante suite à cette réaction, le ligament va subir des dégâts plus ou moins importants. Cette surtension peut également provoquer des dégâts sur le ou les muscles périphériques qui se sont contractés pendant le mouvement réflexe.

Alors comment survient l'entorse ?

Une entorse de la cheville correspond à une lésion se produisant lorsque le pied se tourne, se tord ou roule et que l'un ou plusieurs des ligaments de l'articulation, selon les tensions, sont étirés au-delà de leur longueur normale. Cela peut endommager ou déchirer le tissu conjonctif constituant le ligament.

Un changement d'appui mal contrôlé, un tacle, un coup, une chute... tous ces phénomènes extérieurs peuvent être causes d'entorses.

Sur une entorse externe, le ligament le plus souvent touché est le ligament talo fibulaire (voir photo à côté). On retrouve également souvent une lésion du ligament cacanéo-fibulaire, la différence marquante est dans leurs points d'accroche : le premier rattache le péroné au talus, alors que le second relie le péroné au talus. Dans les deux cas il faudra veiller au bon alignement du péroné car les contractions des muscles de la jambe risque de provoquer un désalignement de la tête de l'os avec le condyle du tibia. Ce phénomène peut alors provoquer des tensions au niveau du muscle court fibulaire, long fibulaire et péronnier antérieur.

A la suite d'une entorse, il faut également vérifier les emplacements articulaires. Les contractions provoquées par le choc entraînent des mouvements qui peuvent maintenir dans le temps la tension sur les ligaments. La tête du péroné, la cuboïde, le scaphoïde font parties des plus impactés.  

Différence entre foulure / entorse / luxation et symptômes associés

  • Foulure : c'est un étirement ligamentaire sans lésion profonde et sans blocage articulaire. Les limites physiologiques du ligament sont dépassées provoquant une douleur plus ou moins intense dans les mouvements. La douleur disparaîtra en quelques jours (3 à 4 jours) car aucun blocage articulaire ne maintient l'étirement ligamentaire dans le temps et le ligament n'est pas vraiment blessé.
  • Entorse : c'est un étirement ligamentaire avec blocage articulaire. Les limites physiologiques du ligament sont dépassées et provoque une déchirure plus ou moins importante et l'étirement ligamentaire peut être maintenu dans le temps par un mouvement articulaire.
  • Luxation : dans une luxation les surfaces articulaires ne sont plus en contact l'une avec l'autre rendant tous mouvements impossibles. Une douleur insupportable accompagne l'étirement avec une lésion profonde voir l'arrachement brutal des ligaments et autres structures péri-articulaires. Il faut une réduction rapide de la luxation pour éviter les atteintes vasculaires et neurologiques qui pourrait être la conséquence du déplacement d'un des os. La rééducation d'une luxation est longue et l'articulation luxée restera fragilisée.

Les entorses de la cheville sont classées également en 3 grade sellons la gravité :

  • Grade 1 : légère élongation et quelques lésions au niveau des fibres du ligament ;
  • Grade 2 : rupture partielle du ligament avec une certaine instabilité ;
  • Grade 3 : rupture totale du ligament et instabilité importante.

Les symptômes associés à l'entorse périphérique commenceront par une douleur qui dépendra de la violence du blocage. Puis l'inflammation provoquée par l'étirement ligamentaire favorisera le gonflement de l'articulation réduisant sa mobilité. Dans certains cas, un hématome peut se former si une des structures est touchée plus ou moins gravement. Il peut aussi subvenir suite à la lésion du muscle qui a été impacté et qui a pu lui aussi être blessé. L'apparition d'un hématome indique très souvent  qu'au moins une structure a été blessée de manière assez significative.   

Que signifie la présence d'un hématome ou d'un gonflement ?

S'il y a hématome ou gonflement, on entend très souvent dire qu'il faut utiliser de la glace. Pourquoi ? Simplement parce que la glace va permette de calmer les douleurs et réduire l'inflammation. Cependant, du point de vue de la médecine chinoise, son utilisation répétée est déconseillée. En effet, les propriétés sanguines sont communes à celles de l'eau. Ainsi, le sang, tout comme l'eau, soumis à du froid, gèle et se contracte.

Dans notre cas, l'apport de froid et surtout de glace va entraîner une contraction de l'hématome sur lui-même, causant à la longue une stagnation de sang mais aussi de qi (d'énergie).

Il faut bien garder à l'esprit que le qi fait circuler et réchauffe le sang et que le sang transporte et nourrit le qi. Si l'un stagne, l'autre fini par bloquer aussi. Mais nul besoin de comprendre ce mécanisme pour comprendre que le sang va finir par se resserré sur lui-même s'il est soumis au froid. L'hématome causé par l'entorse va donc mettre plus de temps pour s'évacuer mais risque également de perturber les ligaments en appuyant dessus.

De plus, si la poche synoviale (capsule interne à l'articulation qui protège celle-ci des frottements) a craqué pendant l'entorse, le liquide va se rependre dans l'articulation et créer un gonflement nommé épanchement de synovie. Nous retrouverons ainsi le même processus pour ce liquide soumis au froid.

On appliquera donc la poche de froid au moment de la blessure pour limiter le gonflement et contracté les veines qui limiteront l'hématome puis, dès le lendemain, on passera à une autre solution. Le froid, s'il est un bon anti-douleur rapide, ne soigne aucunement une blessure.

Comment traiter l'entorse ?

Il faut tout d'abord bien garder à l'esprit que les symptômes douloureux qui disparaissent très vite ne marquent pas une guérison complète. En effet, la cicatrisation complète ligamentaire dure plusieurs mois, pouvant même aller jusqu'à une année sur les cas les plus grave. Il faudra donc faire attention, surtout chez les sportifs confirmés, car le repos et l'attente ne font pas partie de leur univers conceptuel. Il sera d'autant plus difficile de faire comprendre que la reprise après une entorse devra respecter la règle des 5 R :

  • repos ;
  • reprise ;
  • raisonnable ;
  • régulière ;
  • raisonnée.

Les traitements à appliquer ensuite.

Plusieurs techniques permettent de drainer efficacement l'articulation blessée. Dans un premier temps il est fortement conseillé de faire des cataplasmes d'argile verte : celle-ci est anti-inflammatoire, de nature froide, donc rafraîchissante, et draine l'humidité. Tout ce qui nous faut dans le cas d'entorse.

  • Pour traiter efficacement : faire un cataplasme d'argile vert assez épais (environ 2cm) sur la zone à traiter, puis le recouvrir d'un torchon ou d'un film alimentaire (idéal) pour ne pas le laisser sécher. Tant qu'il sera frais, il va pomper l'humidité en trop dans l'articulation, calmer l'inflammation et activer la circulation sanguine. Gardez-le 2h minimum jusqu'à une nuit puis laver à l'eau tiède pour ne pas gâcher le regain de circulation.

Quand la zone commence à dégonflé et n'est plus chaude, signe que l'inflammation à quasiment disparu, on conseille d'appliquer des huiles chauffantes : baume du tigre ou autres huiles (un praticien en médecine chinoise pourra aussi vous conseillé sur des huiles qui auront des effets plus stratégiques et appropriés : activer la circulation, cicatriser...).

L'apport de chaleur sur l'articulation va détendre les tendons et les muscles contractés jusque-là et leurs permettre de reprendre leurs mouvements initiaux. Pour rappel, il faudra vérifier et corriger les mouvements articulaires non-naturels qui ont pu se produire lors de l'entorse pour annuler la tension sur les ligaments.

  • Faire des bains à l'eau salée, avec 1 cuillère à soupe de gros sel marin par litre d'eau tiède permet de détendre les muscles. Il faudra alternés bain chaud et bain froid : préparer deux cuvettes : une d'eau très froide (18° environ) et une autre d'eau très chaude (40° environ). Placez le pied en alternance dans les deux cuvettes. On commence toujours par la cuvette d'eau chaude pour détendre tous les muscles et ligaments puis on sort la zone blessée, on la manipule pour appliquer les corrections de réalignement et on la place immédiatement dans l'eau froide. La chute de la température va contracter rapidement la zone qui aura été préalablement réalignée. Cela permet ainsi de consolider celle-ci dans la bonne position et non pas de la laisser guérir dans une position qui est peut être modifié suite à l'entorse (désalignement de la cheville, décalage du cuboïde...) et qui pourrait ainsi maintenir un étirement musculaire ou ligamenteux et favoriser les douleurs et les blessures futures.

Le massage

Il est conseillé de masser l'articulation plusieurs fois par jours en suivant les lignes anatomique. On peut également appliquer une petite pression sur les ligaments (points ressorts) pour favoriser leur relâchement. Le massage va activer la circulation et éliminer au maximum les tensions mais aussi les adhérences qui pourraient se créer suite au choc, adhérence qui peuvent persister et empêcher un bon rétablissement.

Le mouvement

La nécessité du mouvement pour la préservation musculaire s'impose quand elle est possible. Cela ne signifie pas qu'il faille forcer de manière irraisonnée mais plutôt essayer de garder en mouvement l'articulation touchée. On fera donc en sorte de la mobiliser jusqu'à la limite de la douleur, tous les jours, pour éviter la fonte musculaire mais également pour activer la cicatrisation dans cette zone abîmée. On peut le faire avec l'aide d'une attelle, qui évite un faux mouvement mais donne quand même la capacité à l'articulation de bouger.

Pourquoi utiliser le mouvement ?

Simplement parce que c'est le mouvement qui mobilise le qi et le sang. En sollicitant l'articulation, un appel de sang neuf vers celle-ci se créait et va favoriser l'apport d'agent cicatrisant permettant une bonne cicatrisation. De plus, le mouvement va permette de faire travailler les muscles qui se sont contractés lors de la blessure et ainsi favoriser le retour à l'état initiale des tensions musculaires, surtout si vous favorisez des étirements légers de la zone à traiter.

La reprise

La reprise du sport ou d'une sollicitation plus intense de l'articulation blessée suite à une entorse doit se faire de manière progressive, sans exagérer la demande. De manière générale et sur une entorse bénigne, on reprendre au bout de 21 jours tranquillement, en gardant à l'esprit que les douleurs peuvent persister jusqu'à 6 semaines ! Et en respectant les 5R :

  • repos ;
  • reprise ;
  • raisonnable ;
  • régulière ;
  • raisonnée.

Il est enfin conseillé, dans les cas où les douleurs persistent ou si les gonflements ne diminuent pas au bout d'une semaine voire deux, de consulter un professionnel pour vérifier que la blessure n'est pas plus grave.

Il est également recommandé de consulter un praticien en médecine chinoise, un ostéopathe ou tout autre corps de métier qui sera en capacité de réaligner la cheville et les blocages articulaires. En médecine traditionnelle chinoise, l'utilisation de l'acupuncture, des techniques de Tuina (qui permettent de remobiliser les articulations) et de pharmacopée peut grandement accélérer la guérison. Certaines entorses, si elles sont prises tôt et traitées de manière efficace, peuvent se résoudre en moins d'une semaine.

La prise en charge immédiate en acupuncture au moment de l'entorse, si elle est légère, peut même régler le problème directement. J'ai eu le loisir de tester cette technique plusieurs fois (au cours de compétitions sportives notamment) avec de très bons résultats. Sur une entorse plus lourde, le dégonflement sera beaucoup plus rapide et permettra une meilleure circulation dans la cheville et un meilleur rétablissement.

Enfin, sur le plan organique, il est conseillé de nourrir le foie. C'est un organe qui est chargé particulièrement du contrôle et de la lubrification des tendons et des ligaments. S'il est en bon état de fonctionnement, ils seront bien alimentés et donc plus solides, tout en étant plus souples. Dans le cas contraire, si le foie n'est pas en très grande forme, les tendons sont plus rigides, tirant plus fortement sur les muscles et plus fragiles et se blessent plus facilement.

Si l'on pratique une activité sollicitant beaucoup les articulations ou si l'on est sujet aux entorses facilement, il faut être prudent quant à la consommation de certains aliments. Attention à l'abus d'alcool et autres produits peu recommandés. Le foie retraitant les toxines, il faut donc, surtout en période de récupération, éviter de le surcharger pour lui permettre de mieux travailler.

  • Du point de vue diététique, vous pourrez utiliser l'orge chinois, le chou, les pommes de terre, le sucre de canne blanc, le miel, le réglisse ou le sucre de canne roux pour atténuer les tensions, surtout musculaires.
  • Pour favoriser les tendons, le cheval, le crabe, l'orge chinois (yiyiren), le raisin, le sésame noir (heizhima), la caille, le bœuf, l'œuf de caille, la châtaigne, l'anguille pour accélérer la réparation des tendons et les consolider.

La couleur des noms d'aliments correspond à leur nature. Celles-ci sont utilisées dans les conseils diététiques personnalisés que je fournis à mes patients.